Chez Loulou

Carrefour des amours mortes
Et des gueules cassées
Juste le nez sur la porte
On voyait sans entrer
Qu’ils avaient déjà trinqué

Chez Loulou

Au comptoir mais debout
Ils sirotaient une misère
A petites gorgées amères
Dans de tous petits verres
Lampés jusqu’au bout

Chez Loulou

Un petit monde de vieilles gens
Souvent gauches et maladroits
Tout un pays d’en bas
D’hommes au cœur comme çà
Serré dans un verre à la fois

Chez Loulou

Pas de chahut quand
De retour d’enterrement
Ils oraisaient en silence
Ils arrosaient en silence
Un ancien du contigent

Chez Loulou

C’était au fond d’une cour
Qui avait du être un jardin
Jusqu’au vilain jour
Où un promoteur malin
Ne bâtisse le bonheur urbain

Chez Loulou

Et le dernier client servi hier
Au frais comme une bonne bière
Préférait le vin d’ici à l’au-delà
Des caves il n’y en avait pas
Chez Loulou c’était comme çà

Philippe Villard

Jongleur de mots et débusqueur de sens, le journalisme et le goût des littératures ont dicté le chemin d’un parcours professionnel marqué du sceau des rencontres humaines et d’une curiosité insatiable pour l’autre, pour celui dont on doit apprendre.